Intégrer les actifs immatériels dans son entreprise : DOs & DON’Ts

Cet article s’adresse aux entrepreneurs qui ont développé (à titre personnel et individuel, sans rémunération ou hors contrat) un logiciel, une application, un site Internet, un brevet, une marque alors que leur start-up n’est pas encore en phase de lancement ou de croissance. Si vous êtes propriétaire à titre personnel de ces actifs, il est alors intéressant de se poser la question de l’intégration de ces actifs immatériels (incorporels) dans la société lorsque celle-ci prend forme. Quoi et comment faire, ou ne pas faire? Quand?

 

Pourquoi intégrer son brevet, logiciel, site, application et/ou marque à sa société ?

Différentes raisons peuvent être avancées :

  • Anticiper les demandes de futurs associés ou investisseurs, qui souhaitent avoir la certitude que tous les actifs de la société sont bien la propriété de celle-ci. Le faire en amont évite bien des discussions et permet de valoriser un peu mieux sa société.
  • Formaliser l’implication des différentes parties prenantes (associés, partenaires…) et éviter de futurs problèmes ou les désamorcer.

Intégrer ses actifs peut aussi permettre d’augmenter son capital social, ce qui permet de :

  • Asseoir la crédibilité de la société avec un capital plus important. Il est utile pour cela de connaître la capitalisation des acteurs de son domaine pour s’inscrire dans les mêmes ordres de grandeur.
  • Un capital plus important permet de bénéficier d’avantages fiscaux sur les dividendes versés aux actionnaires (cf. imposition des dividendes représentant plus de 10% du capital social).
  • Obtention d’aides financières plus importantes, la plupart étant indexées sur le niveau de fonds propres de la société.

Bonnes pratiques et pratiques douteuses : quels impacts ?

Voyant de bonnes pratiques, mais aussi des pratiques discutables en matière d’intégration d’actifs (brevet, logiciel, site, application, marque…), il semble évident que le conseil sur ce champ est hétérogène et relève parfois du mauvais tuyau de son comptable (ou d’un ami) qui bricole, car souvent, il ne sait pas faire autrement.

Par exemple, j’ai été confrontée au cas d’entrepreneurs qui ont développé un logiciel, puis ont créé leur start-up. Un ami comptable leur a conseillé de vendre le logiciel à la société (pour un montant faible par rapport à la valeur réelle du logiciel), pour générer du cash dans le portefeuille des associés et augmenter ensuite le capital par un apport en numéraire…

Pour formaliser l’apport de l’actif dans la société, j’ai donc pu rencontrer différentes « stratégies » plus ou  moins heureuses :

 

DON’Ts

  • Le statu-quo: « on ne fait rien et on verra bien », « on se fait confiance ». Ce scénario finit souvent mal quand les associés se désolidarisent car rien n’est formalisé le plus souvent.

 

  • La vente de l’actif à la société par les associés, pour augmenter le capital. Cette solution a en effet l’avantage de ne pas mettre un commissaire aux apports dans la boucle, mais c’est bien le seul. Le but est ici de transformer l’actif en cash grâce à la vente, pour permettre aux associés de réaliser une augmentation de capital avec ce cash (ou simplement de soustraire une forme de revenus de la société). C’est une fausse bonne idée et en rien une économie. Les inconvénients sont nombreux :
    • Aucune valeur n’est créée : la société et les associés perdent de l’argent
    • La vente engendre en effet un trou dans la trésorerie,
    • La vente peut impliquer l’application de la TVA et les sommes versées aux associés sont à intégrer dans la déclaration de revenus
    • Le montant de la vente n’est pas nécessairement objectif, et peut donc être remis en cause plus tard,
    • Les frais d’augmentation de capital demeurent

DOs :

  • Concession de licence entre les associés et la société. Elle a le mérite de permettre de formaliser les parts de propriété de chacun (idéalement dans un contrat de copropriété préalable) et d’assurer que l’actif est exclusivement exploité par la société. Cela rassure les partenaires de la société. On peut aussi parler d’apport (en nature) en jouissance ou en usufruit, et opérer une augmentation de capital via une évaluation financière de cette licence (exclusive), mais moins intéressante que dans le cas d’un transfert de propriété. La propriété reste en effet dans les mains des associés : il n’y a donc pas de transaction particulière à envisager au cas où l’entreprise dépose le bilan.

 

  • Apport en nature de l’actif. Il permet une augmentation généralement significative du capital en créant de la valeur pour la société.

Les seules dépenses liées à cette opération sont :
– L’étude de valorisation financière par un tiers expert, notamment s’il s’agit de brevet, marque, logiciel, application ou site internet. En effet la plupart des commissaires aux comptes ne sont pas familiers de ces valorisations et ne considèrent pas l’ensemble des critères juridiques, techniques, marketing et financiers, pourtant primordiaux.
– Les frais de commissariat aux apports (généralement incontournable), qui va accréditer la valeur de l’apport.
– Les frais d’enregistrement liés à l’augmentation de capital :

Les apports réalisés par une personne physique ou morale assujettie à l’impôt sur les revenus (IR) au profit d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés (IS), sont imposables au droit d’enregistrement.

Si les apporteurs s’engagent explicitement à conserver les droits sociaux reçus pendant une durée minimale de 3 ans, les apports sont alors exonérés du paiement du droit d’enregistrement fixe :
   – de 375 euros si le capital de la société bénéficiaire est inférieur à 225.000 euros.
   – de 500 euros si le capital de la société bénéficiaire est égal ou supérieur à 225.000 euros.

 – Les formalités de publication

– L’imposition sur la plus-value éventuelle

S’il s’agit d’une invention brevetée ou brevetable, il est possible de bénéficier d’un report de l’imposition sur la plus-value. Cette imposition sera effective lors de la sortie de l’actif (cession) ou la sortie d’un associé de la société s’il y a lieu (et s’il y a plus-value). Si l’opération intervient au-delà de 5 ans, un abattement progressif de la plus-value se déclenche, avec exonération complète au terme de 8 années.

Ce dispositif est un plaidoyer pour réaliser ces opérations suffisamment en amont.

  

Extrait du bulletin officiel des finances publiques

L’abattement pour durée de détention est égal :

– à 1/3 de la plus-value d’apport à partir de six années complètes de détention des droits sociaux ;

– à 2/3 de la plus-value d’apport à partir de sept années complètes de détention des droits sociaux ;

– à 100 % de la plus-value d’apport à partir de huit années révolues de détention des droits sociaux.

L’application de l’abattement pour durée de détention aboutit à l’exonération définitive de la plus-value d’apport au terme de la huitième année de détention des droits sociaux suivant celle de réalisation de l’apport lorsque aucun événement mettant fin au report d’imposition n’est intervenu avant ce terme.

Si une personne physique fait un apport en nature dans une société, elle n’est donc pas imposée immédiatement sur ses revenus. Elle ne l’est éventuellement que si elle cède ses parts sociales, réalise une plus-value, et ce dans les 8 ans de possession de ses parts sociales dans l’entreprise.

Pour les cas des sites internet et applications (sans caractère « original »), des droits d’auteurs ou des marques, la fiscalité est différente. Il n’est pas possible de bénéficier de report d’imposition sur la plus-value. De ce fait, l’évaluation doit mettre en avant l’existence ou non d’une plus-value au moment de l’apport.

Selon les cas, et hors traitement de la plus-value, les frais peuvent représenter de 5.000 à 15.000 €, mais la valeur créée pour la société est généralement bien supérieure : c’est donc plus efficient qu’un simple apport en cash de la somme qui serait réservée à ces frais.

Il est donc important de valider la compétence des professionnels (comptables, avocats et autres conseils) qui vous accompagnent et de connaître les limites de leur expertise (est-il au fait des normes, bonnes pratiques concernant l’évaluation de l’immatériel? Fait-il une analyse approfondi de l’actif ou se contente-t-il de traiter les données économiques?).

En ce qui concerne Nowall innovation, nous accompagnons les entreprises dans la valorisation financière des actifs tels que les titres de propriété industrielle (brevet, marque), logiciel, applications, sites internet.

De plus, si d’aventure, vous avez choisi un « valorisateur » dont vous n’êtes pas certain de l’expertise à la lecture de son rapport, n’hésitez pas à nous contacter. Il nous arrive fréquemment d’assurer une relecture critique du rapport d’évaluation de vos actifs immatériels, avec à cœur la protection de vos intérêts, notamment vis à vis de l’administration fiscale.

Pour en savoir plus, n’hésitez pas à nous contacter.

Sylvie GAMET, CEO Nowall innovation
contact (at) nowall-innovation.com

 

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